Merci Ferré !
Editorial de Georges-Marc Benamou
Extrait du journal Globe Hebdo du 21 au 27 juillet 1993
On doit tous quelque chose à Ferré. On lui doit, lui qui a chanté la solitude, de l'avoir brisée, un soir d'adolescence désespérée dans une ville de province ; ou un matin de révolte vitale dans une chambrée de service militaire ; ou quelque part, jadis, dans le djebel algérien. On lui doit d'avoir, sur les ondes et sur les Teppaz, rompu le silence du conformisme, d'avoir créé un fil d'espoir entre tous ceux qui se reconnurent en lui...
On lui doit Aragon, Baudelaire, Rimbaud et ce pauvre Rutebeuf - dont on ne connaît toujours pas le visage - bien plus sûrement qu'à nos maîtres d'école. On lui doit l'" Affiche rouge ", cet autre Aragon. On lui doit la valse musette, la gaieté, le tango, quand la gauche était triste. On lui doit les coups de gueule, quand la télé était en noir et blanc, qu'elle était la voix de son maître et que le maître s'appelait de Gaulle. On lui doit l'anarchie, la belle, la vraie, pas celle qui, la bombe à la main et le terrorisme à la bouche, avait mal lu Bakounine ou Stirner.
Pas non plus l'anarchisme de droite, cette obscénité fascisante dont notre ami Pascal Ory a bien parlé.
L'anarchie, la vraie, la sienne, c'est une posture éthique.
Merci Ferré.