Ça t' va
Paroles et musique de Léo Ferré
Tu n’ vas jamais aux collections
Tu préfèr’s mett’ tes sous à plat
Pour t’acheter un’ bell’ maison
Drapée par les Dior du gothique
Mais comme on va pas cul tout nu
Et puis qu’ d’abord moi j’ voudrais pas
Tu t’ sap’s chez l’ couturier d’ ton cru
Qu’a des harnais démocratiques
Ça t’ va
Cett’ rob’ de dix sacs
Tes cheveux en vrac
Ce rien qui t’habille
Ça t’ va
Tes souliers pointus
Mêm’ s’ils sont fichus
Ça flatt’ tes gambilles
Ça t’ va
Ce sac en lézard
Qui fait le lézard
Sous ses airs plastiques
Ça t’ va
Cet air sans façon
Dont t’as pris mon nom
Pour viv’ de musique
Cet air sans façon
Dont t’as pris mon nom
Pour viv’ de musique
Tu n’ vas jamais chez Rubinstein
Qu’a d’ la frimousse en comprimé
Qui pour deux plomb’s vous met en scène
La gueul’ des dam’s pour la parade
Et quand tu sors chez les snobards
Et que j’ te d’mand’ si t’es parée
Tu m’ dis avec ton air anar :
« Moi j’ai l’ soleil sur la façade... »
Ça t’ va
Cett’ gueul’ de dix ronds
Malgré c’ que diront
Les cons d’ photographes
Ça t’ va
Ce dos qui descend
Sous l’œil indécent
Des gars qui te gaffent
Ça t’ va
Tes carreaux mouillés
Quand ils ont r’gardé
La joie qui s’ défoule
Ça t’ va
Tes mains tout’s comm’ ça
Par ce je n’ sais quoi
Qui fait les mèr’s poules
Tu n’ vas jamais aux collections
Tu préfèr’s coudre un peu d’ bonheur
Dans not’ carrée et fair’ ton rond
Loin des ballots et d’ leur système
T’es là jusqu’à la fin des temps
À m’écrir’ le courrier du cœur
Tu m’ lâch’s tout just’ pour que j’aie l’ temps
D’ fair’ un’ chanson et dir’ que j’ t’aime
Ça m’ va
Ta prison dorée
Ta bouche adorée
En guis’ de serrure
Ça m’ va
Tes plats mijotés
Tell’ment qu’on dirait
Manger d’ la luxure
Ça m’ va
Ton air bienheureux
Qu’ont les amoureux
Qui restent fidèles
Ça m’ va
Qu’on puiss’ dire un jour
«Et quant à l'Amour
Il n'a aimé qu'elle... »