Le Monde Libertaire janvier 68
• Un inédit de Léo Ferré - Introduction à l'Anarchie
Source de l'image avec dédicace : ml.ficedl.info
L'anarchie est la formulation politique du désespoir. L'anarchie n'est pas un fait de solitaire; le désespoir non plus. Ce sont les autres qui nous informent sur notre destinée. Ce sont les autres qui nous font, qui nous détruisent. Avec les autres on est un autre. Alors, nous détruisons les autres, et, ce faisant, c'est nous-mêmes que nous détruisons. Cela a été dit; il importe que cela soit redit. Le Christ, le péché, le malheur, le riche, le pauvre... nous vivons embrigadés dans des idées-mots. Nous sommes des conceptuels, des abstraits, rien. Une morale de l'anarchie ne peut se concevoir que dans le refus. C'est en refusant que nous créons. C'est en refusant que nous nous mettons dans une situation d'attente, et le taux d'agressivité que recèle notre prise de position, notre négativité est la mesure même de l'agressivité inverse : tout est fonction des pôles. Nous sommes de l'électricité consciente ou que nous croyons telle, cela devant nous suffire. Les postulats, les théorèmes, le quid éternel qui est notre condition d'homo curiosus, tout nous porte vers des solutions d'altérité à des problèmes que nous fabriquons. L'énoncé du problème est suspect par cela même qu'il s'exprime dans un langage conventionnel. Muller, au siècle dernier, s'inquiétait de savoir pourquoi le passé du verbe to love n'est le passé que dans le suffixe. Loved... et le passé s'étale, dramatique. Ce n'est rien d'entendre dire : love; c'est un présent qui nous satisfait ou nous informe, simplement. Il suffit que la désinence entre dans le jeu pour que tout change, en dehors même du problème linguistique. Ce d, ce loved suscite immédiatement le regret qui est de la révolte civilisée. Tout un potentiel d'irréversibilité s'inscrit dans cette lettre qui semble conventionnelle et qui n'est que le résultat d'une longue évolution phonétique tendant vers la simplicité, vers la clarté de la parole. La grammaire soumise, il reste cet outil, ce mot faisant du passé, fabriquant une conscience, des pensées, de la mélancolie, de l'histoire. Nous ne savons pas que les conventions, qu'elles soient linguistiques, morales, religieuses, économiques, nous enferment dans le "social" comme une toile invisible qui nous met en situation de faire quelque chose, de penser cette chose comme si de toute évidence elle était une création de notre volonté de faire et de penser, alors que nous sommes la mouche prise, réduite, par une araignée qui nous observe sans nous manger. L'homme est mangé par la société mais il se réinvente perpétuellement, par une sorte de connivence inconsciente qui fait de la victime l'élan vital de son bourreau. Sans crime, point de bourreau, pardi! Ce sont les juges qui fabriquent les délinquants. Comme le dit Sartre à propos de la trahison, la répression est un crime adventice, un crime au second degré qui ne saurait montrer son visage le premier, c'est pour cela que les sociétés sont répressives : elles tuent par délégation, en second lieu ou mieux, par ricochet. Elles tuent par la Morale, aussi tranchante, mais enfermée et garantie de par la procédure. La procédure est une façon mécano-graphique de tuer son prochain. L'histoire de l'Humanité est une statistique de la contrainte. Je ne pense pas, dans nos modes habituels de penser, qu'il puisse y avoir une vie possible sans la contrainte. La Loi, quelle qu'elle soit - fût-elle la plus désintéressée - comprend toujours ce qui est en dehors d'elle, son contraire, l'anti-loi, ce qui est derrière la promulgation. Il y a dans la pensée du législateur des coins d'ombre où mûrissent les activités louches et nécessaires de la jurisprudence. Une loi contre la torture n'est pas une loi complète si elle ne prévoit pas la torture pour qui torture... "Pour un œil, deux yeux... pour une dent, toute la gueule" disait Lénine, je crois, avec un sens troublant de la métaphysique de la vengeance et de ses intérêts composés... Ce qui saute aux yeux et à la gorge de l'homme c'est bien cette contrainte sans quoi la société ne pourrait subsister, et c'est bien de subsistance qu'il s'agit. Cette force contraignante qui me fait m'habiller aux mieux des canons de la mode contemporaine afin de ne point forcer le rire de ceux qui me regardent, en dit assez long sur l'accoutumance du citoyen à la règle du ça se fait, ça ne se fait pas. Ce qui me hante, c'est la contrainte et pourquoi je m'y donne. Montrez-moi donc un homme dans cet univers de matricule ! La destruction est un ordre inversé. C'est la négation du Bien social que j'analyse dans la grenade amorcée. Qu'est-ce que le Bien social sinon ce qu'aujourd'hui je définis comme étant le Mal, mon Mal, ce Mal qui me bâillonne, qui me soumet. Le gonds de la porte sautés, je rentre dans la Cité, des fleurs noires à la main, et on me lynche. J'entre avec mon Bien qui devient leur supplice, leur Mal par moi donné. Je suis devenu le diable. La contrainte est cette exonération de principe qui me justifie dans ma prudente obéissance, véritable image du civisme.
J'obéis, sans ordre. J'obéis, parce que membre de cette société je m'ordonne de me taire. Il y a chez tout domestique une heureuse disposition d'esprit qui le fait se plier sans casse jamais. Les images contraignantes me sont projetées jour après jour selon des normes acquises et tellement envahissantes d'admirables techniques que le poste de réception qui me transmet les mots d'ordre est réglé pour le son et pour la juste valeur des points, des lignes, par moi. J'ai cessé de penser par moi. Chez moi, je pense ON. Le JE est défiguré par une grammaire nouvelle qui me désapprend la solitude et le courage, celui qui me met à portée de voix de la vraie vie s'est émasculé. J'ai coupé les plombs à mon courage. Je suis noir. Dehors, si je le sortais indemne; il y a fort à parier qu'on me le rapporterait avec un catalogue de pénalités. Nul droit privé, nul droit public ; ce sont des mots de doctrine. Il n'est qu'un droit : pénal. Rien ne va plus dans l'obligation que je me mets sur le dos en signant au bas du contrat, sans l'assortiment prévu de contraintes pécuniaires, si je ne m'oblige pas. Pourquoi n'assure-t-on pas la contrainte ? Parce que la peine ne peut se garantir. Elle est assumée de toute éternité. J'en suis l'artisan. Si je la révoque, elle se retourne et me gifle. À genoux, je rythme la cadence des coups qu'elle me porte, sous le charme, malgré tout, du délai et de la grâce. Dans ce Bien, dans ce Mal, je me sens étranger. Je suis un forain de la Morale. Si le Bien est femelle, le Mal laboure. Un troisième sexe m'importe davantage et c'est peut-être cela, l'indifférence. L'indifférent s'est dépossédé de son droit. Il n'invoque plus rien. Il regarde, le cas échéant, il regarde le droit : signal d'alarme, rue barrée, conscience du fait social. Je crois en une relativité juridique dès que j'ai sabordé les postulats fondant la règle de droit. Nous sommes encore des romanistes. Le Code civil est un traité pratique de droit romain revu par une séquelle révolutionnaire. Nous ne sommes guère loin du sacramentum in rem, de l'in jure cessio, et des formules du très ancien droit qui sanctionnait telle manigance juridique. On a simplement dénigrifié les actions de la loi pour en arriver à cette tartufferie jurisprudentielle qui saute de l'article 1382 à l'article 1384 et qui inclut de la responsabilité dans une arche de béton, s'il le faut. La responsabilité des choses a mis le risque dans la gueule du chien. Le maître mord par procuration, et c'est cela la civilisation du droit : donner une pensée à la matière inerte, mettre l'homme au ras de la chose, le dépersonnaliser au point de transformer ce qu'une morale antique nommait la faute en un risque latent. Le risque c'est de la faute antidatée. De cette machinerie dont je suis le serf, de cette incessante ingérence de mes viscères, de mon sang, de mes nerfs, de cette prison définitive où l'on m'a mis - moi, mammifère bipède - je ne me libère que par des mots. Ma pensée, régie par mes humeurs, mon imagination qui se règle sur le déjà fait, le déjà vu, me sont une tromperie supplémentaire. Mon désespoir est un désespoir chimique. Je me meurs de mourir à chaque seconde. Je n'ai de salut que dans le refus, une tromperie de plus mais terriblement suractivante. Je suis roi de ma douleur et c'est elle qui me soumet. Au fond, la douleur serait un plaisir, n'était la démangeaison qui me la met toujours en épigraphe. Sur le livre de notre vie, un mot plein, signifiant : "Souffre !" Le chien qui crie, un homme qui gueule, rien ne les différencie. Je me sens particulièrement "chien" à mes heures de retrait du monde. D'ailleurs, je prends mes facultés de parole. Je ne me parle jamais. Je me chante. Je me mathématique. Je me nature. Je parlerai de cette grammaire qui nous a muselés depuis longtemps. Je ne puis supporter la faute d'orthographe. La règle, à ce point ancrée, est au-dessus de la règle. Elle est transcendée, dirait le philosophe... Et la règle se surpassant devient "moi". La morale, d'où qu'elle émane, est bien près de cette autodictature. Ce ne sont pas les tyrans qui gouvernent. Le monde c'est de l'anarchie tempérée par des règlements de solitaires et quelques barèmes policiers. La propriété ? C'est le mot qu'il faut changer. Je suis propriétaire de mon droit de revendiquer "cette" propriété, objet de ma convoitise et dont la sanction possessive ne s'en remet qu'à l'argent qu'il me faut pour en devenir le maître, à moins que je n'aie décidé de transgresser l'ordre établi et de m'emparer par la force ou par la ruse d'un bien que je considère, de toute éternité, comme devant m'appartenir. Et ce qui m'appartient, je peux le casser : c'est ça le droit de propriété, le droit de détruire... ad libitum ! Le droit de propriété sur le Van Gogh que j'ai payé trois cent millions, ça n'est pas celui de le mettre à la banque en attendant les jours maigres, ça n'est pas non plus celui de le regarder tout seul, chez moi, en maugréant ou non sur les façons particulières que le peintre avait d'aller au bordel, le rasoir dans la poche et l'oreille aux aguets... Non, mon véritable droit de propriété sur ce tableau est de pouvoir le brûler, dans ma cheminée, sur un bûcher d'indifférence, avec, dans l'œil et dans cette mémoire imaginée qui ne se trompe guère car les choses tournent en rond, les critiques d'art de l'époque qui n'ont rien vu du génie de Vincent. Or, moi, je vois et je suis devenu seul à "voir" dans cette pyromanie critique !
Je ne vois pas la pâtée de mon chien parce que je ne mange pas "chien". Ce n'est pas si sûr que ça, d'ailleurs. Dans le confort de mon salaire, de ma quinzaine, de ma paie, de mes émoluments, de mes honoraires (curieuse façon de multiplier le vocabulaire du fric...), je ne regarde même pas le chien manger. C'est un monde qui m'indiffère. Moi, je suis un homme qui pense et qui mange du sauté de veau, du caviar frais ou du laitage, car le médecin me l'a recommandé. Mais ce système niveleur qui consisterait à me mettre à portée animale, à mesurer l'étendue, le territoire de la faim, de l'hydre jusqu'aux abonnés de la cantine communautaire, à souscrire au garde-manger des mouches tirées à quatre épingles sur la toile d'araignée en me disant : "C'est très bien, je "m'araigne", j'en ai encore pour quatre jours...", cela,jamais, et pourtant... Si je meurs de faim, je broute, je dure, je ne pense plus au manger "chien" ou "homme" mais il importe que je "tienne" parce que la société m'a identifié, elle m'a donné un nom, je suis le fils de quelqu'un. Ce n'est pas un droit, la filiation, c'est un état. Un chien qui vole reçoit un coup de pied. Si je vole un pain, on m'enferme. Mon travail donc me vaut de n'être pas aux fers. Il vaut mieux, des heures durant, planter des clous dans l'imbécile planning de la merde prolétarienne que de bayer aux corneilles et, le soir venu, tendre des filets aux "honnêtes" gens et puis aller faire des comptes au commissariat de police. Le contentieux correctionnel que j'évite me fait l'esclave de quelqu'un et, aujourd'hui, d'un être précis : la société anonyme. Je veux dire par là, non pas l'artifice juridique qui met le Capital dans une action cotée en Bourse, mais ces gueules multiples du trottoir et du métro, le Peuple, l'humus sur lequel pousse tous les quatre ou cinq ans ce qu'il est convenu d'appeler le suffrage universel ! Les gens que je ne vois n'existent pas. Si je ne suis pas un bandit c'est parce que le Peuple a voté pour qu'on invente le Procureur de la République. Le peuple, c'est le fourrier de la tyrannie. Une psychanalyse de la patrimonialité commencerait par nommer : le droit se parle. Mon patrimoine ne saurait vaincre jamais les prétentions de l'État à me soumettre à ses vues d'expropriation ou l'appréhension d'un voisin arguant d'une servitude de mitoyenneté si je ne produis pas la preuve cadastrale de mon bien. Qu'est-ce que le Mien sinon une convention achetée ? Mon chêne à moi, mon chêne est centenaire. Une vue plus saine m'indiquerait qu'il est à celui qui l'a planté, au chêne père de la libre nature, au paysage dont il est un point mouvant dans la tempête ou statique dans l'été bleu. Qu'il est à lui-même, enfin ! Mon rein est à moi...
Cette parole qui m'enchaîne au droit patrimonial est une parole de circonstance, une parole admise, écrite au bas de l'acte notarié et transcrite sur le registre des hypothèques, autre certitude d 'authenticité. Le mot est lâché : "authentique". Je m'en remets au parchemin, à l'écriture serve de cette parole inventée par le jeu social. Nous jouons à nous barricader dans les mots de possession : ma maison, ma femme, mon stylo, ton droit, son chien, Karl Marx n'a pas assez médité sur la conjugaison possessive, la seule à ne jamais craindre les fautes d'orthographe, la conjugaison du mien et du tien. Toute l'Économie Politique repose sur un geste : la main qui livre, la main qui prend. Les théories sont en marge et n'expliquent qu'une certaine psychologie dans la détente de la production. Les macrodécisions ont des doigts d'acier. Le sien reste plus objectif : le sien est une parole d'attente. Le sien est un bien ignoré du bourgeois et en vitrine pour le gangster. En dehors des normes juridiques - et, singulièrement, des contraintes pénales - le sien perd de son objectivité : il peut devenir mien ou tien. C'est dans une telle perspective langagière qu'il convient d'étudier la psychologie du voleur. Le voleur, sorti du chemin légal, ne prend qu'un bien vacant, et qui est vacant à l'heure de la technique, au moment où l'attirail du fric-frac est mis en œuvre, au moment du "guet" - ce qui est un travail dur et précis, au même titre qu'un travail sur un objet manufacturé. Le voleur ne prend pas "ses" risques. Il assume sa condition de voleur : il a contre lui la loi et, pour lui, l'anti-loi c'est-à-dire sa loi propre. Il est significatif que cette loi dite "du milieu" qu'un romantisme sommaire a reléguée dans la mythologie du film policier soit en réalité une façon marginale de dire le droit, aussi, ou plutôt de dire l'anti-droit. Dans le cas précis du "milieu", le code d'honneur est un code du silence. Celui qui parle, qui se met "à table" est passé de l'autre côté. La trahison lui a servi de support pour rentrer dans le rang. Et le rang, c'est une façon d'attendre les décorations ou le règlement de comptes. Au fond, la trahison est une morale du bien-être social, et le bourgeois trahit par omission. Sans situation juridique il n'y a pas de droit. Sans mot pour le nommer il n'y a pas d'arbre. Nous faisons nos chaînes : par la règle, par les mots. J'entends par mot - cela va de soit - l'immédiat concept qui me rive au discours intérieur. Sans le mot "arbre" toute une tranche de ma connaissance s'évanouit : je ne vois plus de forêts, je ne sais plus m'y promener, je perd le feu et, perdant le feu, mon sang se fige, je suis perdu à tout jamais. J'entends bien le désespoir me sonner dans la brume de cette constatation. Je ne parle plus. Je ne vois plus les nids, le recommencement total à chaque fois des mêmes vols, des mêmes cris, des mêmes chants. Sans arbre, où se nicheront les oiseaux ? Quand je les vois voler, pourquoi ne puis-je plus penser au mouvement des ailes, à cette géométrie apprise et que je retrouve dans le vol du corbeau, encore que, croassant, il inquiète les données magiques, apprises elles aussi ?
Quand je vois un corbeau, je retrouve Poë et, ce faisant, les fiches psychanalytiques de Marie Bonaparte, et e me demande quel est celui de deux qu'il fallait mettre à la question. Le corbeau est devenu, pour moi, un fait littéraire et c'est cela que je nomme le désespoir. Je ne sais plus voir le corvidé. Je vois une forme allusive du destin et sa résonance littéraire ou poétique : trois coups portés à la vitre. L'anarchie, cela vient du dedans. Il n'y a pas de modèle d'anarchie, aucune définition non plus. Définir, c'est s'avouer vaincu d'avance. Définir, c'est arrêter le train qui roule dans la nuit quand il s'écartèle à l'aiguillage. Autant dire qu'on est pressé d'en finir avec l'intelligence de l'événement. C'est par son inaptitude foncière à ne savoir rien définir que l'homme piaffe dans les remarques et la philosophie. Un train à l'aiguillage, c'est un devoir bien fait, c'est de la route honnêtement vendue à moi, passager, acheteur de cette ligne de nuit qui me conduit à X en passant par l'aiguillage Y, bretelle nécessaire mais dont j'ignore la raison déviationniste. On ne me dévie pas de ma route, on me la rend parfaite et sûre. Moi, je ne pense qu'au bruit d'enfer et la peur m'envahit. Je définis l'aiguillage par rapport à mon problème de solitaire roulant. Si je pense au bloc dispensateur de voie libre, j'y pense en imaginant l'homme aux manettes et à la possibilité d'une fausse manœuvre. Je ne donne pas la définition de l'ingénieur, je ne vois pas la route en coupe où je risquerais de comprendre techniquement la croisée des rails. Je ne sais pas qu'après mon passage - et il est bien question de MON et non pas d'une donnée objective et chiffrée par le trafic - cette soupape se fermera, des bras de fer illuminés de vert se mettront en garde, pour laisser glisser vers un point X, mon semblable, ce "prochain" de la gare que j'ai vu naguère sur le quai, hélant un porteur et s'installant dans le train suiveur, à cinq minutes, ce train suiveur qui me court aux fesses - et j'y pense - et qui trouvera la route libre sur ce chiffre de fer tordu, objet de mon ressentiment. Il n'y a pas que moi dans le monde des trains. Et pourtant, c'est cela qui me retire tout à fait du monde à ce moment précis où - contre toute évidence - je me crois seul, fait comme un rat dans ce véhicule qui, au dépôt, n'est jamais qu'une abstraction de plus fuyant dans la nuit. Dans cette solitude du muscle, je ne me connais et ne me reconnais aucun maître, et voilà que je suis contraint de me solidariser avec le rail, le rail de mon inquiétude et le rail des autres, de tous les autres. J'ai le moyen de m'immoler à cette peur et je n'en ai qu'un, immédiat, auquel je n'ose me rapporter : le signal d'alarme, car au-delà de cette poignée que je crois être de sécurité, il y a un tarif de pénalité, ce nivellement de l'autonomie, un simple avis qui me muselle. Ainsi de l'homme en société : il n'ose jamais tirer le signal, garant de sociabilité. Le mot "seul" est chargé de brume, c'est une parole de réflexion, de lumière réfléchie, noire, à peine valide. C'est dans le "seul" que je me retrouve chaque soir après la pause des travaux journaliers et divertissants. Dans la rue, le solitaire est agréé par l'identique, par le monsieur qui marche au-devant et qui lui réfléchit cette lumière particulière qui fait d'un dos commun, courbé, le propre dos du suiveur, de l'attente. Cette solitude viscérale est à la portée de toutes les consciences. Qui n'a dit qu'il se sentait seul dans une foule ? Cliché piteux qui fait de cette foule un creuset de misère mentale. Aussitôt embrigadé, aussitôt muselé, défenestré, tapi dans le lieu commun politique. Il faut des lieux communs aux tyrans qui s'essuient sur le multiple de la sottise. Les tyrans, ce jour, ont beau jeu. Politiquement, la solitude est un non-sens. Il n'y a même pas de quoi faire un solitaire dans l'arsenal démocratique. L'isoloir est une place publique. Cette psychologie du vote secret est un rejet de la confession. On se confesse à un bulletin. L'isoloir, vespasienne sèche, ce couvent du socialisme à l'heure apéritive... J'enrage à la pensée que des hommes acceptent de s'isoler administrativement autrement que pour uriner. La souveraineté nationale à ce point traquée dans un cabinet municipal, cela monte du fond de mon cœur comme une nausée de principe. Les idées qui sentent, je ne sais rien de plus définitif dans notre condition de Peuple-Roi.
Léo Ferré
(Texte repris dans le "Testament phonographe" et dans "La mauvaise graine")
03.01 : Le tribunal donne raison à Barclay pour l’affaire de la chanson À une chanteuse morte
(demande de dommages et intérêts voir septembre 1967)
Le Monde du 4 janvier 1968
• Léo Ferré débouté de son action contre Barclay
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
07.01 : émission Chansons imaginaires
Chansons imaginaires, émission du 07/01/1968, notice descriptive
Résumé : Sur différents plans de cinémathèque on entend successivement chanter :
--- Edith PIAF : "A Hambourg"
--- Marc OGERET (que l'on voit peu) : "Mon tradéristra tra la lère"
--- Léo FERRE : "Ostende"
.../...
Il typographie le livre Benoit misère en vue de l’éditer lui-même
(voir le texte Je donnerai dix jours de ma vie)
11.01 : Vu la Ruchette à Gourdon :
- On s’est invités demain soir, chez toi, c’est impoli, non ?
- Oh ! mais non, alors … c’est comme ça que ça fait plaisir…
27.01 : Ici Radio-Canada, 1966-1985, 27 janvier 1968
• D'une certaine manière - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
31.01 : Photo-journal, 1937-1978, mercredi 31 janvier 1968
• Empêchez les copieurs de vous voler un dollar ou un million !
par Pol Chantraine & Roch Poisson
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
Le Monde libertaire de février 1968
• Léo Ferré
Disques, par Jean-Ferdinand Stas
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
01.02 : L'Action, 1962-1971, jeudi 1 février 1968
• Des émissions pour Madame - D'une certaine manière - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
08.02 : Le Progrès du Golfe (Rimouski), 1904-1970, 8 février 1968, CJBR - AM - FM - télévision
• Chansons françaises - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
21.02 : Le devoir, 1910- (Montréal), mercredi 21 février 1968
• Disques - Publicité
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
24 et 25.02 : Maison de la culture de Bourges
Paris-Normandie du 27 février 1968
• Les Semaines culturelles de Rouen à Elbeuf
par Nicole Hebert
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
Le 6 mars de cette année, Léo Ferré est invité par la Comédie de St-Etienne à présenter une série de récitals. Alain Meilland, jeune comédien de 20 ans, qui joue « LE REVIZOR » dans cette troupe va rencontrer celui qu’il regarde comme une « idole ». Quelques semaines plus tard, les deux hommes vont se retrouver dans des circonstances tragiques, toujours à St Etienne en avril de la même année. Cet « avril de 68 », Ferré le chantera dans « Pépée », sa chanson dédiée à son chimpanzé qui vient d’être tué par Madeleine, son épouse qu’il vient de quitter définitivement. Léo est, comme on dit en cavale entre Lyon et St Etienne. Ces retrouvailles, puis, en plein MAI 68, son adoption au sein de la nouvelle équipe que Léo a constitué pour l’accompagner : Maurice Frot (écrivain) son secrétaire, et Paul Castanier (Popaul) son pianiste seront déterminantes pour la vie et la carrière de Meilland. Pendant cinq ans, cette bande des trois, entrainera souvent sur les routes des tournées ce quatrième jeune frangin qui chante, lui aussi, et qui n’est encore qu’un « enfant du mois de MAI ».
Dans « Et Basta ! » Léo évoque cette époque « 68/73 ! non-stop ! … et cette voiture qui débordait…. Qu’est-ce qu’on riait… ». Meilland dira, lui, plus tard de cette rencontre : « Si, la passion de la scène ne s'est, pour moi, jamais éteinte, je le dois essentiellement à cet homme sans qui la vie artistique qui est la mienne aurait été bien moins extraordinaire. C’est bien à cet homme que je dois mon regard ouvert aux poètes et le sentiment d'être toujours resté "debout". Et si j'ai attendu si longtemps pour rendre hommage à ce frère qui m'a aussi, pendant 25 ans, fait don de sa confiance et de sa fidélité, c'est sans doute parce que nous étions de si proches amis que j'avais peur de ne pas contrôler tout l'affectif que l'on peut, doit, ou ne pas, mettre dans une création artistique… Y parviendrai-je du reste ? Au fond il m'était plus facile de créer un spectacle sur Vian, Cendrars, ou Eluard que j'aimais comme poètes sans connaitre les Hommes ».
Source : Léo de Hurlevent - Léo Ferré chanté par Alain Meilland
Quand Alain Meilland racontait ses souvenirs : la rencontre déterminante
Malheureusement la vidéo n'est pas la bonne, juste une pub ! Les vidéos ne sont plus accessibles (http://www.leberry.fr/bourges/loisirs/art-litterature/2017/10/16/quand-alain-meilland-racontait-ses-souvenirs-en-video-de-ferre-a-barbara-en-passant-par-lavilliers_12591215.html).
Ces émissions étaient accessibles depuis L'Yonne Républicaine. Par exemple, la publication de la page Lavilliers est datée du 18/06/2011 (https://www.lyonne.fr/bourges/2011/06/18/alain-meilland-et-bernard-ouillon-est-devenu-bernard-lavilliers-video_196817.html)
Source : http://www.leberry.fr/bourges/loisirs/art-litterature/2017/10/16/quand-alain-meilland-racontait-ses-souvenirs-en-video-de-ferre-a-barbara-en-passant-par-lavilliers_12591215.html
« J’ai découvert Ferré par…
INT : Justement Léo tu l’as rencontré comment ?
Alors là, on rentre un peu dans la vie privée, c’est vraiment une rencontre, c’est vraiment la rencontre déterminante, donc c’est un petit peu plus tard c’est en 68. Belle année.
INT : tu disais que tu étais né pour avoir vingt ans en 68.
Oui, c’est ça, je suis né en 48 pour avoir vingt ans en 68. Donc j’étais chez Gasté et Léo était invité par pour chanter pendant toute une semaine tous les soirs, donc j’étais ravi car je me disais, il va être là au théâtre, moi j’étais comédien presque plus figurant que comédien d’ailleurs, je sortais juste de l’école d’art dramatique. Donc, voilà, Léo, il est venu et le soir comme ça timidement, on partait manger au restaurant avec lui avec les gens de la troupe, moi je parlais un petit peu avec lui mais c’était un peu compliqué, c’était en mars 68 et là il était avec son épouse Madeleine Ferré et entre eux c’était terrible, c’était, il s’engueulait, ça allait très très mal entre eux, c’était la fin.
Donc, un soir, comme ça, après le restaurant, on était pas loin de l’hôtel où il était et pas loin de là où j’habitais. En fait, bizarrement on est rentré à pied, c’était pas loin et on est passé devant chez moi.
J’habitais dans un endroit qui était rigolo parce que c’était un ancien en face d’une usine où on essayait les armes, ça s’appelait la rue de l’épreuve parce qu’on éprouvait les armes, ça c’était une bien connue qui fabriquait ça. Donc j’avais raconté ça à Ferré, ça l’a fait beaucoup rire, tu vois j’habite là en fait, je l’accompagne jusqu’à son hôtel et après je vais me coucher et une heure après on frappe à ma porte et c’était lui.Il me dit : « Je viens de m’engueuler avec Madeleine, cette salope et tout, je m’en vais, emmène-moi, trouve-moi un café ouvert, et on est parti tous les deux, je crois qu’il est venu chez moi parce qu’il avait vu, il lui fallait quelqu’un quoi, c’est pas parce que c’était moi, c’était parce qu’il avait repéré, c’est ça, la chance en fait et puis voilà on est allé dans un bar et on a un petit peu parlé des choses, comme ça, et alors, la vraie rencontre, en faît trois semaines après, il y a le grand drame c’est-à-dire Madeleine tue Pépée le chimpanzé, il y a cette merveilleuse chanson qui parle de Pépée, on est en avril 68, le 7 avril de 68, elle tue Pépée et là, il quitte Madeleine, il part en cavale, c’est-à-dire que, il dit pas où il va, c’est-à-dire qu’il quitte le domicile conjugal, c’est pour ça qu’elle va tuer Pépée et il vient habiter à Lyon où il a un ami qui a un hôtel, un restaurant avec des chambres au premier étage, donc il se réfugie là mais il a un problème car il faut qu’il écrive les orchestrations de Ferré 68 du disque et il se souvient qu’à Saint-Etienne, il y a un jeune comédien qui lui a parlé, lui a montré là où il prenait ses cours et qu’il y avait un piano, donc il appelle Jean Gasté et il lui demande, est-ce que ça vous ennuie si je viens la journée parce que vous avez un piano et je serai tranquille pour travailler, il y a un de vos élèves qui m’a dit que voilà, dans les salles de cours des élèves, il y avait un piano.
Gasté lui dit oui, il me dit, écoute Ferré est là, tu vas t’en occuper, et donc j’ai passé deux journées complètes à le regarder parce que j’étais derrière la porte, là, il écrivait ses partitions et puis dès qu’il avait fini, hop on allait boire un coup on est devenu amis comme ça !
INT : en fait tu étais un peu son secrétaire.
Oh non, après il y a des gens qui ont écrit ça, y compris à Bourges, un journal qui est sur internet, on devrait pas l’appeler journal, je n’ai jamais été le secrétaire de Ferré.
Dès qu’il a quitté Madeleine, Ferré prend Maurice Frot que tu connais bien, mais le vrai secrétaire, c’est Maurice Frot mais très vite je vais faire parti de la bande des trois, les trois c’est Frot le secrétaire, Léo et Popaul le pianiste, et donc je vais souvent avec eux sur les galas. Je suis un petit peu la quatrième roue du char, qui fait des petites choses qui essaie de se rendre utile, des fois Léo me donne une petite enveloppe mais je n’ai pas été le secrétaire, le secrétaire c’était Maurice.
INT : c’était comment dire, un rapport paternel
Peut-être un peu, oui, je ne sais pas, je crois qu’il était, il faut comprendre, on était en train de vivre 68, Léo avait besoin du contact avec ces jeunes de vingt ans et moi j’étais peut-être quelqu’un qui, bon j’étais peut-être un chien fou, je racontais des conneries, je croyais que j’avais tout compris, je n’avais rien compris mais je crois qu’il avait envie d’être comme ça, pas que moi d’ailleurs, il avait envie de rencontrer des mômes de 18 – 20 ans
10.03 : émission Dim Dam Dom avec Serge Gainsbourg
Dim Dam Dom, émission du 10/03/1968, notice descriptive
Résumé : Serge Gainsbourg chante Monsieur William de Léo Ferré
07.03 : Le devoir, 1910- (Montréal), jeudi 7 mars 1968
• Disques - Publicité
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
09.03 : Maison de la Culture de Saint-Etienne
Altercation avec Madeleine
10.03 : émission Le petit dimanche illustré avec Marc Ogeret
Le petit dimanche illustré du 10/03/1968, notice descriptive
Résumé : Marc Ogeret chante Blues, poème d'Aragon sur une musique de Léo Ferré.
18.03 : Le devoir, 1910- (Montréal), jeudi 18 mars 1968
• Disques - Publicité
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
18.03 : Pépée se blesse en tombant sur un pieu
22.03 : gala à Elbeuf, Léo s’y rend tout seul
ou
28.03 : rupture avec Madeleine
(voir Dis donc Ferré p.217)
24.03 : près de Souillac, échange téléphonique houleux
28.03 : émission Palmarès des chansons
Palmarès des chansons, émission du 28/03/1968, notice descriptive
Générique et auteurs : Compositeur musique préexistante, Ferre, Léo
28.03 : Le devoir, 1910- (Montréal), jeudi 28 mars 1968
• Disques - Publicité
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
28.03 : Le Progrès du Golfe (Rimouski), 1904-1970, 28 mars 1968, CJBR - AM - FM - télévision
• Chansons françaises - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
01.04 : téléphone à Maurice Angeli et vient habiter quelques jours avec lui
07.04 : mort de Pépée et massacre des animaux de Perdrigal
??? de ?? ??? 1968
• Léo Ferré - Sa guenon détruit son château - Léo aimait pourtant bien Pépée
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
Paris-Jour ? du ?? avril 1968
• Léo Ferré : "On m'a tué Pépée"
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
14.04 : Discorama avec Catherine Sauvage
Discorama, émission du 14/04/1968, notice descriptive
Résumé : Denise Glaserinterview Catherine Sauvage, à propos de sa rentrée à Bobino. La chanteuse dit aimer le music hall, la jeunesse du public des maisons de la culture, et par dessus tout, Léo Ferré.
.../...
14.04 : Show avec Juliette Gréco
Show, émission du 20/04/1968, notice descriptive
Résumé : Juliette Grécochante Jolie môme de Léo Ferré.
.../...
24.04 : il écrit la chanson Pépée à Vannes à l’hôtel
(De gauche à droite) Maurice Frot (1928-2004), écrivain libertaire français, René Lochu (1899-1989), ouvrier tailleur et militant syndicaliste, Paul Castanier (1935-1991), pianiste français et Léo Ferré (1916-1993), auteur-compositeur-interprète.
Photo © Geneviève Van Haecke. 1972.
Source : Roger Viollet
26.04 : L'Action, 1962-1971, vendredi 26 avril 1968
• Témoignage - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
La Rue N°1 - Mai 68
• Texte Je donnerais dix jours de ma vie de Léo Ferré
Source : Merci à Alain Lochon pour ce partage.
09.05 : Le Progrès du Golfe (Rimouski), 1904-1970, 9 mai 1968, CJBR - AM - FM - télévision
• Chansons françaises - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
10.05 : gala annuel du groupe libertaire Louise-Michel à la Mutualité avec 6 autres artistes et lance sa chanson Les anarchistes.
Léo Ferré en vedette principale. Le gala devait avoir lieu le 15 mars avec Georges Brassens, malade.
Au printemps 1968, Léo Ferré s’installe avec Marie en Lozère, durant deux mois, à mille deux-cents mètres d’altitude – mais ils dorment à l’hôtel à Aumont-Aubrac – puis en Ardèche, à Cubagnac, près de Sanilhac et de Largentière, dans une maison trouvée par l’intermédiaire de Jean-Pierre Chabrol.
Il est remarquable que, dans une période nouvelle, difficile, attentif à une vie neuve qui s’ouvre pour lui avec, à ses côtés, une jeune femme de vingt-et-un ans, à l’orée – mais il ne le sait pas encore – d’une période d’une grande fécondité artistique, Ferré se tourne de nouveau vers l’imprimerie. Au cours du quatrième trimestre, il imprime un recueil de textes et d’illustrations de quarante-six pages intitulé Mon programme (daté 1969 sur la couverture). Il vit en Ardèche, mais il indique l’adresse familiale de Monaco comme étant celle de l’auteur. Le format est 21 x 31. L’ouvrage n’est pas folioté dans son ensemble, cependant, les pages 7 à 12 sont, elles, numérotées 1 à 6. Les pages 19 et 20 portent les numéros 13 et 14. La page 25 est dite 17. Sans doute ces feuillets avaient-ils été prévus pour une autre réalisation. On observe encore qu’une reproduction de Steinlen est en bichromie (rouge et bleu), un dessin de Pépée par Dimey en trichromie (noir, bleu et jaune). La couverture est aussi en trichromie (noir, bleu et jaune) puisque le personnage dessiné par Dimey a les yeux verts. On peut donc déduire de ces remarques qu’il n’y eut jamais quatre passages mais trois au maximum, alors que les quatre couleurs sont bien présentes dans la plaquette, mais jamais ensemble.
Dans l’année, il imprime aussi une plaquette sans titre et sans date de seize pages, toujours au format 21 x 31, comprenant son texte Bonsoir et un autre de Frot, Léo, forgeron de l’enfer. L’exemplaire que j’ai pu acheter au marché aux livres de la rue Brancion à Paris, il y a peu d’années, porte cette curieuse dédicace au stylo à bille bleu : "Pour Galli le musicien. Ferré, l’autre... musicien de hasard ! Léo Ferré, 12 décembre 1968". J’indique cette suscription manuscrite uniquement parce qu’elle atteste que la plaquette a bien été éditée au plus tard cette année-là.
Il imprime encore une plaquette sans date d’une douzaine de pages, comprenant uniquement ce dernier texte. Le titre est dessiné par Frot.
Ces publications hors-commerce, vendues lors de ses spectacles, sont de simples feuillets dactylographiés sur une machine électrique IBM à boule, tirés sur une petite machine offset et reliés par un dos thermocollé fragile. En dépit de cette simplicité technique, il y a toujours des illustrations et, on l’a vu, des essais de couleur.
Fin de l’été : rencontre avec Michel Lancelot pour l’émission « Radio-psychose » deuxième émission de la série
Source : extrait du livre Campus de Michel Lancelot
Élaboration du recueil Mon programme
27.06 : Le Progrès du Golfe (Rimouski), 1904-1970, 27 juin 1968, CJBR - AM - FM - télévision
• Chansons françaises - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
10.07 : L'Action populaire, 1913-1970 (Joliette), 10 juillet 1968, Deuxième cahier
• Témoignage - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
La Montagne du 19 juillet 1968
• Pour la chanson à "Pépée" merci M. l'anarchiste
Aux feux de la rampe, par R.
• Léo Ferré : "Mon public c'est d'abord ceux qui ont vingt ans"
par Serge Letort ?
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
20.07 : Ici Radio-Canada, 1966-1985, 20 juillet 1968
• Des reportages suisses, français et anglais à l'émission "Partout" - TV
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
23.07 : Le soleil, 1896- (Québec), mardi 23 juillet 1968
• Les idoles du disque et les événements de mai
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
24.07 : Le Progrès du Golfe (Rimouski), 1904-1970, 24 juillet 1968, CJBR - AM - FM - télévision
• Chansons françaises - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
24.08 : Ici Radio-Canada, 1966-1985, 24 août 1968
• Au fil de la nuit - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
01.09 : Entrez dans la confidence avec Catherine Sauvage
Entrez dans la confidence, émission du 01/09/1968, notice descriptive
Résumé : Catherine Sauvage chante Paris canaille accompagnée successivement au piano par Darry Cowl, Oswald d'Andréa et Jacques Loussier.
La Rue N°2 - Octobre 68
• Texte Le chemin d'enfer de Léo Ferré
Source : Merci à Alain Lochon pour ce partage.
Le Monde du 9 octobre 1968
• La première représentation de la tournée de Léo Ferré...
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
10.10 : D'hier et d'aujourd'hui avec Juliette Gréco
D'hier et d'aujourd'hui, émission du 10/10/1968, notice descriptive
Résumé : Juliette Grécochante Jolie môme de Léo Ferré.
10.10 : Le Progrès du Golfe (Rimouski), 1904-1970, 10 octobre 1968, CJBR - AM - FM - télévision
• Chansons françaises - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
Nombreux concerts enflammés en France et tournée en Algérie et au Maroc.
12.10 : Au Majestic à Alger (04:06)
Algérie : Les années 1960... des artistes de renom en spectacle (archives écrites)
Source : youtube.com
24.10 : Le Progrès du Golfe (Rimouski), 1904-1970, 24 octobre 1968, CJBR - AM - FM - télévision
• Chansons françaises - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
Les Nouvelles littéraires du 24 octobre 1968
• Léo Ferré sur les barricades
par Jacques Tournier
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
Le Monde libertaire de novembre 1968
• Léo Ferré revient
Variétés, par Suzy Chevet
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
09.11 : Ici Radio-Canada, 1966-1985, 9 novembre 1968
• Du pays de France - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
Couverture du programme
10.11 : à la Mutualité (Paris). Gala de soutien aux libertaires.
Source : Passage Léo Ferré
16.11 : À l’affiche du monde, émission télévisée.
À l’affiche du monde du 16/11/1968, notice descriptive
Résumé : Reportage chez les parents de Léo Ferré à Monaco. Le chanteur montre l'appartement où il a vécu enfant, il évoque sa jeunesse à quelques km de la frontière italienne et son plaisir de vivre, aujourd'hui, ailleurs. Marchant le long de la côte, il parle de la solitude et du silence qu'il recherche .
« Léo tout seul au piano chante l’Adieu et Marizibill
Léo arrive chez lui à Monaco et voix off, il commente la visite de sa maison, ses parents sont assis, Léo est assis sur son lit dans son ancienne chambre, vue du port de Monaco.
Léo au piano chante l’Amour n’a pas d’âge
Léo marche seul près de la mer sur des rochers
Léo au piano chante Pépée et dit à la fin : « Pépée c’est ma fille, je l’aime beaucoup, elle m’attend maintenant dans ma maison et quand j’aurai fini, j’irai la voir, j’irai la promener. »
Le Monde du ?? novembre 1968
• L'opinion de Télémagazine
La télévision, par Jacques Siclier
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
Télémagazine du ?? novembre 1968
• L'opinion de Télémagazine
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
Le Monde du 6 novembre 1968
• Léo Ferré sera le prochain invité... (Radio-Psychose)
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
Le Télégramme de Brest du 18 novembre 1968
Source : Merci à Jacques Layani pour ce partage
21.11 : Le Progrès du Golfe (Rimouski), 1904-1970, 21 novembre 1968, CJBR - AM - FM - télévision
• Chansons françaises - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
Manuscrit des paroles de C’est extra et L’idole
(écrites en Ardèche décembre 1968, un matin de 4h30 à 7h30, musique comprise et composée sur piano loué à Montélimar)
Source : extrait de la revue Les copains d’la neuille n°31
03.12 : La presse, mardi 3 décembre 1968
• "Du pays de France" - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
les 11 & 13.12 puis le 07.01.69 : Enregistrement aux Studios Barclay à Paris de l’album blanc (L’été 68).
Consécration ; osmose avec la génération de mai 1968 ; rôle de révélateur des grands textes poétiques.
14.12 : Ici Radio-Canada, 1966-1985, 14 décembre 1968
• Croque-Monsieur et Croque-Madame - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
21.12 : Ici Radio-Canada, 1966-1985, 21 décembre 1968
• Croque-Monsieur et Croque-Madame - Radio
Source : BAnQ (Bibliothèque et Archives nationales du Québec)
Couverture du programme
1968-1969 : au Théâtre de la Région Parisienne.
Source : Passage Léo Ferré
« J’étais rentré promener mon chien et mon chimpanzé, dans cette campagne.. les campagnes sont toutes belles, mais lorsqu’on y vit mal, avec des gens qui ne sont pas bien, elles deviennent salopes ! Les campagnes salopes, ça te fait mal au cœur, partout !
Alors j’étais rentré … je suis allé au piano, j’avais besoin de me libérer et j’ai écrit les paroles et la musique d’une chanson qui n’était pas pour moi … je n’avais pas prévu de pouvoir la mettre dans le public !J’ai joué ça à quelqu’un que j’aimais bien autour de moi…
(voir article Léo Ferré vit toujours à Gourdon juillet 1996)Et puis, je devais envoyer des chansons à un type du marketing du disque… qui est la merde, vous savez ça ? Je vous le dis ! Ne coupez pas là, hein, ne coupez pas ! … parce que les gens ne savent pas que c’est le désastre dans notre vie à nous ! Et alors, je devais envoyer les chansons, il m’en manquait une et j’ai envoyé celle-là, aussi ! Qu’est-ce qui s’est passé ? Ils ne l’ont pas mise ! Ils n’ont rien compris ! L’amour et la tragédie de l’amour, les gens du commerce et du marketing ne savent pas ce que c’est ! C’est toutes des salopes ! … Et alors, après, ils l’ont mis dans un disque … Mais elle n’est pas dans le programme de tous les disques que j’ai faits chez Barclay de 1960 à 1974, tu as compris ? Voilà ! Je voulais vous le dire parce qu’il y a longtemps que ça me travaille, ça ! … Il faut bien que je le dise parce que ça me fait mal, et quand ça fait mal, quand on en parle, quand on dit que ça fait mal, ça fait un peu moins mal. En tout cas, on le dit… »
Ainsi Léo Ferré conclut son interprétation dans cette vidéo d'Avec le temps par quelques paroles entrecoupées de longs instants de silence durant lesquels seul le piano occupe à lui seul tout l'espace :
"Avec le temps va... Hé hé...
[piano]
On n'aime plus...[piano]
T'as compris ? Heureusement qu'il y a le temps hein... Hein?[piano]
Si y avait pas le temps bah on s'rait marron hein, on reviendrait resonner à ta porte[piano]
Et voilà...[piano]
Je viendrai pas sonner moi..."
Titre original : Chants d'Amour, Chants d'Amore de Richard Olivier
Plusieurs chansons d’amour de différents chanteurs Johnny Halliday, Berliner, Cabrel, Brel mises en scène d’une façon assez étrange
Réalisation : 1991
Date de sortie : 1992
Pays : Belgique
Genre : Documentaire
Durée : 54'
Format„: 16mm
Synopsis : Chants d'amour, chants d'amore nous concerne tous puisque l'on y chante l'Amour. Mais l'amour est ici sans espoir. Chaque poème, chaque parole nous parle de désespérance. D'entrée de chant, Léo Ferré, seul au piano interprète Avec le temps nous rappelant qu'en AMOUR TOUT COMMENCE PAR DES CHANSONS, TOUT FINIT PAR DU CHAGRIN. Ferré, cet amant de la nostalgie, nous accompagne dans nos chagrins passés, présents et à venir. D'autres tels que Francis Cabrel, Michel Rivard, Jacques Brel, Toots Thielemans, Gérard Berliner, Henry Purcell, Johnny Halliday, Danièle Messia nous disent l'Amour enfui, déchiré, oublié, délaissé, usé. Ce film cérémonial est tout le contraire d'une émission fast-food. Il n'est pas né pour être " consommable " et c'est sans doute la raison principale qui justifie son existence et le rendra durable, voire éternel au même titre que l'Amour lui-même.
Casting
Son : Jean-Claude Douley, Frans Wentzel
Montage : Pilar Morales
Réalisateur, réalisatrice : Richard Olivier
Scénariste(s) : Richard Olivier
Equipe technique : Jean-François Boucher (Directeur de photographie )et Monique Licht (Directeur de production)
« A c’était un grand monsieur, Léo Ferré » soupire Ginette Delclaux. Ginette, Léo l’appelait « Ruchette », parce qu’elle tenait l’épicerie à l’enseigne de « La ruche » où la famille Ferré allait s’approvisionner. Léo Ferré aimait bien Ginette Delclaux.
C’était en 1963. Les Ferré venait de quitter l’atmosphère bourdonnante de Paris pour s’installer dans le Quercy. Léo et Madeleine avaient acheté une propriété dans un hameau proche de Gourdon, à Pech Rigal, dans la commune de Saint-Clair. Pech Rigal est devenu « Perdrigal ». Perdrigal était un grand château XVIII entouré d’herbes folles.
…/…
Léo Ferré était très abordable. Très simple, vous comprenez, pour s’intéresser à des petits épiciers comme nous » dit encore Ruchette… « Il nous aimait, et nous l’aimions. »
L’anarchiste avait abattu depuis longtemps les barrières sociales. Ruchette livrait les courses au château. Léo l’invitait à dîner. Lui passait au piano. C’est ainsi que Ruchette a entendu la première fois « Avec le temps ».
« Nous avions tous les larmes aux yeux quand nous l’écoutions chanter. C’était très émouvant ».